Le propriétaire qui subit une expropriation du tréfond de son terrain afin de permettre le passage d’un tunnel de la RATP, ne peut être indemnisé de la dépréciation du surplus et se voit refuser une indemnité en raison du surcoût d’un éventuel projet de construction.
1°) Absence d’indemnisation au titre de la dépréciation du surplus
L’office du juge de l’expropriation ne s’étend pas à l’indemnisation du préjudice résultant de travaux publics ou de la présence d’un ouvrage public. Ce chef d’indemnité relève en effet de la compétence du juge administratif (Par ex : Cass. Civ. 3, 6 déc. 2018, n°1724.312).
Cela crée une complexité procédurale considérable dans le cas, pourtant très courant, où l’expropriation a justement été sollicitée en vue de la réalisation d’un ouvrage public.
L’affaire commentée ici, dont la manifestation la plus récente est un arrêt de la Cour administrative d’appel de Paris du 19 décembre 2023, a débuté avec la décision d’exproprier le tréfond d’un terrain afin d’y installer un tunnel de la RATP.
Le juge judiciaire reconnait certes que les propriétaires dont un terrain est partiellement exproprié, puissent solliciter une indemnité pour dépréciation du surplus. Mais encore faut-il que cette dépréciation résulte directement du transfert forcé de propriété et non de la présence de l’ouvrage public projeté (Cass. Civ. 3, 6 déc. 2018, précité).
Tel n’était pas le cas en l’espèce, puisque le préjudice invoqué tenait au surcoût que devrait supporter un projet de construction entrepris par les expropriés, en raison des contraintes liées à la présence du tunnel. C’est la raison pour laquelle ces contraintes ne pouvaient donner lieu à une indemnisation par le juge de l’expropriation.
2°) Absence d’indemnisation du surcoût supporté par un éventuel projet de construction
Suivant les étapes précédentes de la procédure, les propriétaires expropriés se tournèrent vers le tribunal administratif de Montreuil, puis la Cour administrative d’appel de Paris.
Mais conformément à sa jurisprudence traditionnelle, le juge administratif n’accorde aucune indemnité au titre d’un préjudice qu’il estime être seulement éventuel. Or, les propriétaires, n’avaient pas encore développé un projet immobilier précis sur le terrain.
La Cour administrative d’appel a donc rejeté la requête. Elle prend soin toutefois, de donner une méthodologie aux expropriés et précise : « si les consorts G... entreprennent à l'avenir un projet de construction sur leur terrain, il leur appartiendra alors de solliciter le cas échéant l'indemnisation du préjudice susceptible de résulter de la présence du tunnel dans le tréfonds, si les caractéristiques du projet sont telles que l'existence de cet ouvrage renchérisse effectivement le coût de la construction ».
Le chemin vers l’indemnisation existe donc bien, mais il est semé d’embûches.
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